Résidents français mais salariés à Dubaï, quelle est l’imposition ?

Comme vous le savez peut-être, vous êtes imposé en France sur l’ensemble de vos revenus mondiaux. En ce sens, si vous êtes résidents français et que vous percevez des revenus étrangers, vous êtes susceptibles d’être imposé deux fois. Une fois dans le pays source des revenus, et une seconde fois en France.

La France a conclu des Conventions Fiscales Internationales (CFI) avec la majorité des pays du monde afin notamment d’éviter ce problème de double imposition.

À cet effet, la France et les Émirats Arabes Unis (ÉAU) ont conclu une convention fiscale le 19 juillet 1989.

Cette convention prévoit des mentions particulières pour l’imposition des salaires.

1. Convention fiscale France-Émirats

L’article 19.1 concerne le cas d’un ressortissant résident fiscal français au sens de la CFI qui perçoit des revenus des ÉAU.

Le principe est que l’impôt payé dans les ÉAU n’est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France. 

Toutefois, le bénéficiaire pourra bénéficier d’un crédit d’impôt imputable sur l’impôt français. 

En pratique, ce crédit d’impôt devrait donc compenser l’imposition française. 

Les revenus dubaïotes sont tout de même pris en considération pour le taux d’imposition du redevable. Dans les faits, ils augmentent donc effectivement l’imposition finale mais moins qu’une double imposition.

Le cas échéant, les revenus sont imposables en France sous déduction de l’impôt payé aux ÉAU. Concrètement, concernant les salaires, le taux d’imposition aux ÉAU étant nul, le ressortissant acquittera pleinement l’impôt français. 

En conclusion, l’article 19.1 bénéficie aux redevables qui sont exclusivement résidents fiscaux français. L’article 19.2 s’applique aux redevables qui sont résidents fiscaux des deux États.

2. Application à un ressortissant français salarié aux Émirats

Le Conseil d’État, dans un arrêt du 20 mars 2023 n°452718, a eu à juger de l’application de l’un ou l’autre des paragraphes susvisés.

En l’espèce, il s’agissait du cas d’un ressortissant français, détaché aux ÉAU par son employeur.

Les juridictions du fond considèrent, au regard du droit français, que le redevable doit être considéré comme résidant fiscal des deux pays. Ils appliquent donc l’article 19.2 de la convention.

Le Conseil d’État considère quant-à-lui qu’il convient d’analyser en priorité les dispositions de la CFI relatives à la résidence fiscale pour trancher le débat. 

Cette position est inédite : il est habituellement de mise d’analyser en premier la situation au regard du droit français, puis d’un point de vue internationale.

À la différence du droit interne français, la CFI prévoit une solution lorsqu’un ressortissant peut être considéré comme résident fiscal des deux États. 

L’article 4 dispose en effet que, dans ce cas, le résident doit être rattaché au pays dans lequel se trouve :

  • Son foyer d’habitation permanent,
  • Lorsque ce foyer se trouve dans les deux pays ou dans aucun, là où se trouve le centre de ses intérêts personnels et économiques, 
  • À défaut, son lieu de séjour habituel,
  • Et, en dernier ressort, sa nationalité. 

.

En l’espèce, la famille du requérant réside en France. Son foyer d’habitation permanent ainsi que le centre de ses intérêts personnels sont donc en France. 

La haute juridiction tranche que le requérant est résident fiscal français au sens de l’article 4 de la CFI.

Si la lecture de la CFI conclut, comme le droit interne, à une résidence fiscale en France, elle a toutefois pour effet d’exclure la résidence aux ÉAU. 

Il s’ensuit que, ne pouvant être considéré comme résident émirati, l’article 19.2 n’est pas applicable au requérant. Il convient alors d’appliquer les dispositions de l’article 19.1, relatives au résident français percevant des revenus émiratis.

Dans un second temps, le Conseil précise que l’application de l’article 19.1 n’est pas subordonnée « à la condition que les revenus concernés aient été effectivement imposées dans les ÉAU ».

Cette précision est précieuse en l’espèce, puisque, pour rappel, les ÉAU n’ont pas d’impôt sur le revenu des personnes physiques. 

3. Conclusion

Cette solution est inédite : elle donne priorité à la CFI sur le droit interne pour déterminer la résidence fiscale.

Contrairement au droit interne, l’article 4 de la CFI règle le problème de la double résidence à tous les coups. Même lorsqu’aucun critère ne permet de trancher, il reviendra aux administrations de se mettre d’accord entre elles.

Cet arrêt devra donc être complété et confirmé par la jurisprudence à venir. 

Vous l’aurez compris, pas toujours clair de prendre des positions avant une certitude juridique et fiscale !

N’hésitez pas à nous contacter pour toutes vos problématiques d’expatriation et de double imposition.

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