Vous connaissez tous le fameux régime d’exonération de la plus-value de votre résidence principale.
C’est un dispositif fiscal très avantageux mais l’administration veille depuis ces dernières années particulièrement aux opérations.Le présent article a pour but d’analyser les récentes jurisprudences pour vous permettre de définir cette notion de résidence principale et savoir si votre opération actuelle ou future peut sans risque bénéficier du cas d’exonération des plus-values pour vente de sa résidence principale.
1 – Durée d’occupation du logement
La qualification de résidence principale nécessite une résidence habituelle et effective pendant une certaine durée.
Ainsi, le logement doit être occupé pendant une durée suffisamment significative pour que la réalité de la résidence principale ne puisse pas être remise en cause par l’administration fiscale. D’accord mais ce n’est pas très précis… car aucune durée d’occupation minimale n’est précisée par l’administration fiscale. Autrement dit, la durée de l’occupation est une question de fait, appréciée au cas par cas par l’administration fiscale et le juge de l’impôt en cas de contentieux.
La jurisprudence récente rappelle toutefois que la brièveté d’occupation du logement n’est pas de nature à remettre en cause l’exonération.
Concrètement, des durées d’occupation très courtes, comprises entre six et onze mois, ont été admises (CAA Paris 21-02-2018 n° 17PA00527 : RJF 6/18 n° 625 ; CAA Douai 04-12-2019 n° 18DA00503 ; CAA Paris 13-06-2019 n° 18PA01605).Occupation du bien pas que pour la vente
2 – Occupation du bien pas que pour la vente
Attention pour l’administration fiscale, « l’exonération est refusée lorsque l’occupation au moment de la vente répond à des motifs de pure convenance et notamment lorsque le propriétaire revient occuper le logement juste avant la vente et pour les besoins de cette dernière ».
En clair, ne vivez pas dans le bien juste pour sa mise en vente et l’exonération de plus-value.
Par exemple, il a déjà été jugé que des durées d’occupation de quatre mois, ou de sept mois et demi, « n’ont pu suffire à conférer à chaque bien immobilier le caractère d’une résidence principale » (CAA Nantes 29-10-2018 n° 17NT01410). Dans cette affaire, le vendeur avait cédé successivement deux biens immobiliers pour lesquels il réclamait l’application de l’exonération de résidence principale. Les justificatifs versés n’étaient pas pertinents. Le caractère temporaire de l’occupation a été à priori, apprécié au regard de la succession des opérations de vente.
3 – Inoccupation du logement vendu
Vous n’êtes pas obligé de vivre dans le bien immobilier pour être qualifié de vente de résidence principale. L’administration fiscale admet le bénéfice de l’exonération lorsque le logement est libre au jour de la cession sous réserve qu’il ait été occupé par le cédant jusqu’à sa mise en vente et que la cession intervienne dans des délais normaux.
Pendant cette période d’inoccupation, le logement ne doit pas avoir été donné en location ou occupé gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers.
L’administration refuse de fixer a priori un délai fixe maximum pour réaliser la cession mais indique que, dans un contexte économique normal, un délai d’une année constitue en principe le délai maximal.
Néanmoins, dans certaines circonstances, la jurisprudence récente a pu admettre que le logement soit inoccupé pendant plus de deux ans au jour de la vente. Ces cas pourraient être maintenus dans cette période du Covid parfois pas toujours propice aux ventes immobilières dans certains villes.
La Cour administrative d’appel de Douai a par exemple jugé normale la période de vente de deux ans et deux mois, comprise entre le départ du logement et la signature du compromis, dès lors que le redevable justifiait avoir accompli un ensemble de procédure nécessaires à la vente du bien (CAA Douai10-04-2018 n° 16DA01239).
La Cour administrative d’appel de Paris a admis récemment un délai de seize mois car il était prouvé un état des démarches réalisées pour vendre le bien en produisant deux attestations d’agences immobilières et une première promesse de vente bien que non signée « (CAA Paris 13-06-2019 n° 18PA01605).
4 – Critères divers de qualification de la résidence principale
Ci-après une liste d’éléments pouvant servir à qualifier ou non le bien immobilier comme résidence principale. Ces preuves peuvent donc vous servir ou vous desservir dans votre dossier.
- les factures d’électricité et d’eau, la consommation d’eau potable facturée au contribuable incohérente avec la composition de la famille du contribuable (CAA Douai 17-07-2020 n° 18DA01579 ; CAA Bordeaux 02-07-2020 n° 18BX01825),
- les dépenses de mobiliers, notamment la cuisine équipée (CAA Paris 29-05-2019 n° 18PA01317 ; CAA Nantes 25-04-2019 n° 17NT02484),
- les frais de déménagement (CAA Bordeaux 4-10-2012 n° 11BX00432 : RJF 2/13 n° 167),
- l’adresse figurant sur les déclarations de revenus (CAA Douai 17-07-2020 n° 18DA01579)
- les démarches tendant à indiquer le changement d’adresse auprès des services postaux, des établissements bancaires et du service des impôts (CAA Paris 29-05-2019 n° 18PA01317 ; CAA Paris 13-06-2019 n° 18PA01605)
- les courriers de la banque et de la compagnie d’assurance prenant en compte la nouvelle adresse (CAA Paris 21-02-2018 n° 17PA00527 : RJF 6/18 n° 625),
- l’installation d’un accès internet haut débit (CAA Paris 29-05-2019 n° 18PA01317),
- la qualité de membre de conseil syndical au sein de la résidence (CE 23-10-2013 n° 361233 / RJF 1/14 n° 41),
- une carte de stationnement au titre de sa résidence, le formulaire de location d’un parking (CAA Paris 29-05-2019 n° 18PA01317),
- un permis de construire mentionnant une autre adresse de domiciliation (CAA Lyon 25-08-2020 n° 18LY04374 ; CAA Lyon 18-12-2018 n° 17LY01861).