COVID 19 et loyers commerciaux, la Cour a sonné le glas

Dans sa décision du 30 juin 2022 la Cour de cassation s’est prononcée sur l’application des ordonnances du 25 mars 2020 en rapport au droit commun, sur la qualification en droit de la fermeture des locaux commerciaux afin de justifier ou non le défaut de paiement de certains preneurs et enfin sur la qualification de la Covid 19 comme un cas de force majeure. 

Cette décision très attendue vient clore le débat concernant le contentieux abondant et les différentes positions des juridictions. 

En l’espèce, un pourvoi en cassation a été formé suite à une décision de la Cour d’appel de Grenoble statuant en référé, concernant les loyers commerciaux dus par un gestionnaire de résidences de tourisme à son bailleur pendant la crise sanitaire.  

1. L’exception d’inexécution 

Ce levier juridique permet à une partie au contrat de ne pas exécuter ses obligations si l’autre partie ne respecte pas les siennes. Dans le cas présent, certains locataires ont justifié l’absence de paiement des loyers au motif que le bailleur ne respectait pas son obligation de délivrance des locaux commerciaux.  

Toutefois, la Cour de cassation écarte cet argument au motif que : 

  1. « Les restrictions résultaient de mesures législatives et réglementaires » 
  2. Et que les mesures prises ne peuvent être « imputable aux bailleurs, de sorte qu’il ne peut leur être reproché un manquement à leur obligation de délivrance »

Autrement dit la plus haute juridiction considère que les bailleurs ont respecté leurs obligations de délivrance étant donné que les restrictions gouvernementales ne sont pas de leurs faits. 

2. Perte de la chose louée

A l’instar de l’obligation de délivrance, cette obligation pesant sur le bailleur implique que si la chose louée (le local commercial) est détruite en totalité ou partiellement, le locataire n’est pas tenu au paiement des loyers. 

Si certains tribunaux l’écartaient d’emblée, la Cour d’appel de Paris avait récemment reconnu que la perte de la chose louée lors des fermetures administratives liées aux restrictions gouvernementales pouvait s’apparenter à la perte de la chose louée.

Toutefois, la Cour de cassation reconnait d’un côté que la perte de la chose louée peut être totale ou partielle mais de l’autre, qu’elle doit surtout être définitive. Or, comme nous le savons, les mesures gouvernementales en l’espèce, n’ont été que provisoires concernant la suspension du paiement des loyers commerciaux. 

3. Force majeure

La force majeure nécessite la réunion de trois critères cumulatifs. Ainsi, l’événement entrainant la force majeure doit être : 

  1. Imprévisible autrement dit impossible à anticiper ;
  2. Irrésistible, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de l’éviter ;
  3. Extérieur aux parties.

L’événement peut être temporaire, le contrat sera alors suspendu temporairement. Si l’événement est définitif, le contrat sera alors résilié de plein droit. 

Toutefois, même si les conditions semblent ici réunies pour l’invoquer, la Cour de cassation reconnait depuis longue date que la force majeure ne s’applique pas dans le cas d’une obligation de payer. 

Ainsi, par ces trois décisions, la Cour de cassation vient remettre de l’ordre et semble donc se prononcer en faveur des bailleurs. Cette ligne directrice peut être, comme certains le remarquent, influencée par les aides gouvernementales dont les locataires ont (largement) bénéficié. 

En conclusion, compte tenu de la décision rendue, les bailleurs seraient en droit de réclamer le paiement de la totalité des loyers impayés pendant la crise sanitaire. 

Toutefois, il s’agira de rester attentif sur les autres moyens n’ayant pas été invoqués par la Cour de cassation à savoir, la mauvaise foi du bailleur et l’imprévision. 

Affaire à suivre…

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