Clause de déchéance du terme et clause abusive

Dans le cadre d’un emprunt bancaire, le contrat prévoit généralement que le défaut de paiement d’un seul terme permet à la banque d’exiger la totalité des sommes dues. Cette clause est extrêmement contraignante pour l’emprunteur, elle fait peser sur lui des conséquences pouvant être graves.

Afin de le protéger, il est souvent prévu dans ces mêmes contrats que sa mise en œuvre doit être précédée d’une mise en demeure de payer. Ce faisant, l’emprunteur aurait alors la possibilité de l’éviter.

Dans le cadre d’un crédit immobilier, la clause peut être rédigée comme suit : 

« À défaut de règlement par le débiteur [l’emprunteur] d’une ou plusieurs mensualités due en vertu du présent contrat, le créancier [la banque] pourra, après l’envoi d’une lettre RAR valant mise en demeure de régler la ou les échéances payées, prononcer la déchéance du terme. La dette sera alors intégralement exigible. »

Toutefois, certaines fois, la mise en demeure est écartée et la clause de déchéance est applicable dès le premier défaut de paiement par l’emprunteur.

Dans un arrêt du 16 juin 2021, la Cour de cassation a dû se prononcer afin de déterminer si la clause prévoyant la déchéance du terme sans mise en demeure préalable été abusive. 

A ce titre, une clause abusive est définie par l’article L.212-1 du Code de la consommation comme une clause qui a « pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »

Dans les faits, un établissement bancaire consent un prêt de 209.109 euros à un emprunteur. Dans le contrat, il était prévu que « les sommes dues seraient de plein droit et immédiatement exigibles, sans formalité ni mise en demeure, dans le cas d’un retard de plus de trente jours dans le paiement d’un terme en principal, intérêts ou accessoires ». Après deux mois consécutifs sans payer, l’établissement bancaire prononce la déchéance du terme et procède à une saisie-vente (vente du bien afin de rembourse la créance). L’emprunteur porte l’affaire devant les tribunaux et après plusieurs procédures termine entre les mains de la Cour de cassation.

L’emprunteur fonde son argumentaire sur une contradiction entre la jurisprudence française et le droit européen, en s’appuyant sur l’arrêt « Banco Primus » de la CJUE (Cour de Justice de l’Union Européenne) de 2017. Ainsi, selon lui, la clause de déchéance du terme ne prévoyant pas de mise en demeure préalable est une clause abusive et doit donc à ce titre être réputée non écrite. 

Devant une telle question, la Cour de cassation décide de surseoir à statuer, c’est-à-dire qu’elle décale son jugement, afin de poser, à la CJUE, plusieurs questions de droit. Cette procédure permet d’obtenir des éclaircissements sur des interprétations. 

Effectivement, dans l’arrêt « Banco Primus », la CJUE pose des critères afin de caractériser une clause abusive concernant la déchéance du terme, mais ceux-ci peuvent être interprétés de différentes manières d’autant que l’arrêt ne précise pas s’ils sont cumulatifs ou non. 

Par cette opération, la Cour de cassation entend harmoniser les décisions futures et apporter une solution à une question récurrente.

Dans l’attente d’une réponse par la CJUE, il convient d’être prudent d’autant que la jurisprudence française considère qu’à l’heure actuelle, les parties peuvent renoncer à la mise en demeure préalable si la clause est claire, expresse, non équivoque

N’hésitez pas à nous consulter pour toute question sur ce sujet ou analyse de vos contrats de crédit. 

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